l’histoire de notre commune à travers celle du pèlerinage Marial

Le plus célèbre des pèlerinages du Bordelais a fini par faire perdre à la commune son patronyme originel d’Aubiac, pour lui faire adopter celui de Verdelais.

La première Notre-Dame du Luc construite par un chevalier macarien sur Verdelais a pour vocation de demeurer un ermitage. L’installation des Grandmontains en fait au XIIe siècle un monastère qui sera détruit pendant la guerre de Cent Ans. Reconstruit grâce à la comtesse de Foix, il est à nouveau incendié par les Huguenots puis développé par les Célestins pour devenir au XVIIe siècle un grand centre de pèlerinage où les fidèles se rendent souvent pieds nus, depuis la rive de la Garonne. Une renaissance traverse le site au XIXe siècle et se prolonge jusqu’aux années cinquante. La commune reste profondément marquée par la singularité de ce pèlerinage.

Le récit qui va suivre, racontant l’histoire de notre commune à travers celle du pèlerinage Marial qui remonte à l’an 1099, a été très largement inspiré des travaux du père Philippe Gobillot : « Notre Dame de Verdelais » publié en 1926 chez Letouzey Éditeur ainsi que de l’ouvrage du Révérend Père de Rouvray « Histoire du Pèlerinage de Notre-Dame de Verdelais », préfacé par François Mauriac et publié chez Grasset en 1953.

On peut lire la très belle préface de François Mauriac au livre du Révérend Père de Rouvray sur cette page.
derouvray 1
I) A l'aube du peuplement

Remontons jusqu’au lointain passé, où notre pays, couvert de forêts, vit apparaître ses premiers habitants.

A la faveur du reflux de la marée, les voici venir, entassés sur leurs barques, remontant le cours de la GARONNE, alors seule voie de circulation.

Comment l’œil perspicace de ces hommes, en quête d’une terre d’asile, ne se fixerait-il par sur cette petite vallée qui éventre la ligne des coteaux depuis la falaise mourante de LA RAME jusqu’au dôme chevelu et inquiétant du CUSSOL ? Que se cache-t-il là ?

A l’exemple d’autres compagnons qui ont débarqué en cours de route, ils accostent à l’orée du confluent, du côté de l’aval, sautent à terre, cherchent en vain des traces de pas et commencent à s’installer.

D’ici, les uns surveilleront l’accès de la petite vallée pour s’en assurer la possession, tandis que les autres iront prospecter en chassant et en pêchant. Ici, ils tiendront leur comptoir de troc pour échanger avec les navigateurs de passage leurs fournitures de peaux, de fourrures et de victuailles contre des armes et des outils.

Ainsi naquit notre AUBIAC actuel et le port de la GARONNELLE. Et nos chasseurs d’explorer le pays en remontant vers la source du ruisseau. Un fabuleux paradis ! Des saules, des peupliers croissent en abondance près des rives : voilà du bois léger pour creuser des nacelles, des baguettes flexibles pour tresser des nasses. Plus haut, des chênes, des châtaigniers, des noisetiers ! Quelle belle provision de fruits, mais aussi une riche provende pour le gibier à la chair savoureuse : sangliers, chevreuils, écureuils qui attirent les fauves. A nous les belles fourrures de loups, de renards, de blaireaux, de fouines qui promettent de fructueux échanges au comptoir du confluent. Non, ils ne se sont pas trompés, ils resteront ici.

L’ancien du clan les accompagne, porteur des secrets de la race, il cherche le lieu où la terre parle. Cette terre nourricière, mère de la fécondité, garde mystérieusement son secret. Il veut qu’elle le lui révèle. Bientôt, là, au-dessus du rivage, sur la pente boisée de la colline, un pli du sol entre deux éminences, semblable à une commissure de lèvres lui apparaît. Il coupe un arbre de la futaie, et, de son couteau de silex, le taille en forme de pieu, qu’il enfonce dans le pli de cette grande bouche muette. La terre lui parlera, son poste sera là. Vers lui, en grand secret, les hommes du clan viendront le consulter, il les instruira, les soignera avec des sucs d’herbes et des onguents, tirés des entrailles des fauves. Au cours de certaines nuits, devant le feu où brûleront des victimes, ils viendront vénérer la déesse mère de la fécondité, cette terre si prodigue de richesses.

Ainsi commence la vie mystérieuse de notre vieux LUC au lieu même où s’érigera notre belle basilique de VERDELAIS.
De savantes fouilles révéleront-elles, un jour, la véracité de ce récit vraisemblable ? Il suffirait de trouver une tombe dont la terre garde jalousement le secret, car l’homme est le seul être vivant qui vénère les morts et s’inquiète devant les mystères de la vie.

Comme le passereau retourne au nid de ses parents pour le reconstruire, l’homme revient sur les vestiges de ses aïeux pour y rebâtir leur maison détruite. C’est une des leçons de l’histoire.

II) Aubiac - Le Luc

Une sentence du roi d’Angleterre, Édouard 1er, en date du 27 mars 1289, cite les deux noms « Aubyac » et « Lo Luk » pour désigner deux agglomérations, sises sur le territoire de notre commune.

D’où viennent ces deux noms, chargés d’histoire ?

Au lieu d’en donner tout de go une traduction savante, il est plus profitable de relater la longue histoire qu’ils évoquent.

Chacun que, durant de longs siècles, des hommes ont vécu sur notre sol sans nous léguer d’autre souvenir que celui des vestiges de leur foyer, de leurs outils ou de leur ossements.

edouard 1erL’histoire commence avec le témoignage de documents écrits. Chez nous, c’est à partir de l’an 57 avant l’ère chrétienne, avec le récit de la « Guerre des Gaules », écrite par le chef de l’expédition. Cette invasion romaine amorça une « occupation » de notre pays par les armées et les fonctionnaires de Rome. Cinq siècles durant, cette « occupation » changea les coutumes et la langue de nos aïeux, qui durent adopter les mœurs de l’occupant.

Au IVe siècle, Bordeaux était une des grandes villes de l’Empire romain, célèbre par ses grands hommes et son commerce.

Les riches Bordelais possédaient de vastes domaines sur les rives de la Garonne où ils avaient fait bâtir de belles résidences : LES VILLAS (en latin villa signifie « Domaine rural », comme chez nous « Château » désigne un « vignoble autour d’un chai »). Ils s’y rendaient avec leur bateau de plaisance en suivant le cours de la Garonne, sillonnée alors par un intense trafic commercial et militaire.

L’illustre professeur AUSONE avait un « petit Domaine » (de 350 hectares) à Loupiac, son élève PAULIN, dont la famille langonnaise d’adoption, possédait d’ « immenses Domaines » dans la région, avait l’embarras du choix pour ses congés. Ces belles résidences s’échelonnaient tout au long des rives de la Garonne.

Le site d’AUBIAC eut la sienne, des familles l’ont montré.
« Une tradition orale rapporte qu’une ville importante existait au lieu-dit « QUINQUIN », à l’ouest du chemin de la Garonnelle »
dit une note de l’abbé Dumas, ancien curé de St-Maixant au siècle dernier.

Le mot AUBIAC dérive de deux vocables Latins : Albi – acum
• ALBUS est un nom propre, celui de l’ancien propriétaire, il signifie « Blanc »
• ACUM est un suffixe qui indique « l’appartenance »

ALBI-ACUM signifie à Albus – chez Albus – C’est l’équivalent de nos « lieux-dits » – Meyroux – – Jeanneau -, noms de famille que nous retrouvons dans les actes d’état civil.

Le LUC désignait déjà au Moyen-âge l’ensemble du lieu dit où est érigé de nos jours le bourg de Verdelais – et non – exclusivement – le petit coin champêtre savamment aménagé pour une fin commerciale.

Le mot Luc vient de LUCUS – Le bois sacré, le bosquet – où est vénérée une idole et où une lueur de flamme éclaire la pénombre. En effet, lueur dérive de la racine LU comme lux et lumen, lumière, Luna, astre éclairant la nuit, LUCINA, la divinité romaine qui assiste la mère quand elle « donne le jour » à son enfant. A ce propos, les superstitions, qui ont accompagné longtemps la dévotion à Notre Dame de VERDELAIS, peuvent nous éclairer sur le mystère du culte antique existant au Luc avant sa métamorphose chrétienne.

L’histoire du sanctuaire rapporte l’épisode de la comtesse de Foix implorant Notre Dame pour obtenir un fils. Mais, il y avait aussi le cérémonial mi-liturgique, mi-superstitieux auquel se croyait astreinte la femme affligée de stérilité lorsqu’elle sollicitait Notre Dame de VERDELAIS. Tandis que le prêtre exorciste lui imposait l’étole et de l’autre le verrou de la porte de la chapelle – sans doute pour obtenir sa délivrance de l’opprobre qui l’affligeait.

C’est seulement au IVe siècle, grâce aux moines prêtres de St Martin de Tours que les paysans de notre région furent évangélisés. L’un d’eux, Macaire fut le premier à venir chez nous – ou du moins très près – Vint-il au LUC ? Le chanoine Termos qui séjourna vers 1945-50 à VERDELAIS prétendait que les moines de St Martin étaient venus sur l’initiative de SULPICE SEVERE, le célèbre avocat bordelais, devenu moine et ami de St Martin et de Paulin, le disciple d’Ausone.

Quoi qu’il en soit, un culte chrétien a dû se perpétuer au Luc au cours des cinq siècles des invasions barbares du Ve au Xe siècle.

Quand le Chevalier GERAUD DE GRAVES rentre de la Croisade et choisit comme retraite notre petit coin verdoyant, c’est vraisemblablement pour y faire revivre ou perpétuer la dévotion chrétienne de ses pères. Et, comme la dévotion à la Sainte Vierge s’est répandue dés le VIIIe siècle, il voue la petite chapelle de son ermitage à celle que les chevaliers courtois désignent sous le vocable de NOTRE DAME.

C’est alors que commence L’histoire de VERDELAIS.

III) La Paroisse d'Aubiac

L’ « Histoire » ne commence qu’à partir du moment où nous possédons un document écrit et daté.

Celle de VERDELAIS ne commence qu’en 1160, et encore il ne s’agit que de celle du sanctuaire.

Celle de la « commune » d’Aubiac et Verdelais date de 1790.

Ces deux constatations nous invitent donc, pour les expliquer à situer notre petite patrie dans le vaste ensemble historique et géographique du pays où elle se trouve : l’Aquitaine et la France.

Sans faire ici un cours complet, nous voudrions expliquer l’évènement de 1160, en plein XIIe siècle.

Précédemment, nous avons laissé Aubiac au IVe siècle dans une Gaule romaine prospère.

Depuis l’an 406 des envahisseurs ont surgi, soit en raids sanglants et dévastateurs, soit en occupant momentanément le pays, jusqu’à l’époque où certains ont fini par s’imposer durablement.

Ces derniers sont les Gascons, peuplade du nord de l’Espagne.

clovisLorsque Clovis avec ses Francs refoule les Wisigoths, installés chez nous, ceux-ci chassent les Gascons pour occuper leur pays, tandis que les Gascons, malgré la résistance franque, s’infiltrent par les Pyrénées vers 587.

Leur chef, Sanche Mittarra va s’ériger en monarque et sa nombreuse progéniture se partagera tout le pays allant des Pyrénées aux rives de la Garonne, qu’elle quadrillera en duchés, comtés, vicomtés, seigneuries, pour assurer la sécurité.

En 982, le Duc de Gascogne, établi à Saint-Sever, Guillaume Sanche surprend un débarquement de Normands sur la côte landaise près de l’étang de Léon. Rassemblant une armée, il les arrête à Taller, non loin de Castets des Landes, et leur inflige un tel désastre qu’ils ne reviendront plus.

Dans le pays pacifié, les Ducs de Gascogne et ceux d’Aquitaine s’efforcent d’assurer la tranquillité et de venir en aide aux habitants.

Par une charte, en 1027, le Duc d’Aquitaine Guillaume V et son épouse Aremberghe cèdent à l’abbaye Sainte-Croix de Bordeaux leurs droits sur « le Domaine de Saint-Macaire », qui s’étend alors sur le territoire actuel de Saint-Macaire, Pian-sur-Garonne, Saint-Maixant et Verdelais.

saint severL’abbé de Sainte-Croix de Bordeaux devra fonder un prieuré, près du tombeau du bien heureux Macaire, où il enverra ses moines pour venir en aide aux pauvres, les instruire, les soigner, leur distribuer des vivres.

Près du monastère, un château fort sera édifié, où le seigneur, un descendant de Sanche Mittarra, accueillera les habitants en cas de danger, leur offrira un four pour cuire leur pain et veillera sur le pays pour évincer les intrus.

Les moines vont alors construire l’église de Saint-Macaire.

Nous sommes au début du XIe siècle, l’époque de la création des paroisses rurales.

C’est alors que nos religieux bâtisseurs vont édifier les églises de Saint-Maixant et d’Aubiac sur le territoire qui leur a été confié.

Le style même de l’église d’Aubiac date de cette époque, mais nous avons aussi un document écrit prouvant que l’abbaye de Ste Croix de Bordeaux faisait assurer le ministère dans la paroisse.

Un litige, en date du 17 juillet 1655, oppose l’abbé de Ste Croix à l’archevêque de Bordeaux qui veut nommer à Aubiac un curé de son choix et confier le ministère aux Célestins de Verdelais. Or, l’église et la paroisse d’Aubiac dépendent de l’abbaye de Ste Croix de Bordeaux qui y exerce un « droit de patronage », dont celui de nommer le titulaire de son choix en qualité de « vicaire perpétuel », et assure le traitement de « la portion congrue » (1)

L’archevêque ne peut donc intervenir sans avoir préalablement l’avis de l’abbé et de son chapitre.

Ainsi, antérieurement à 1160, il existait une  » paroisse d’Aubiac  » avec son église et son vicaire perpétuel, délégué par le père Abbé.

1 Depuis 1579, les bénédictins de Ste Croix de Bordeaux avaient quitté le prieuré de Saint Macaire, aussi l’Abbé, n’ayant plus de moines sur place, devait, pour honorer son contrat, assurer un minimum à son  »vicaire perpétuel » d’Aubiac.

IV) Naissance de Verdelais

IV Naissance de Verdelais en 1160 et baptême en 1190

En 1159, l’ermite du Luc, ancien croisé de la première Croisade, GERAUD DE GRAVES, vient de mourir.

Le Seigneur de Saint-Macaire, en accord avec les bénédictins du prieuré et de leur supérieur, le père abbé de Sainte Croix de Bordeaux, appelle des moines du Limousin, familiers des solitudes boisées, pour assurer la garde de la chapelle de Notre Dame, édifiée au Luc (l’actuel Verdelais) par l’ermite.

Le 15 mai 1160, un groupe de moines est accueilli à Saint-Macaire par le prieur. Il les met aussitôt en possession de leur nouveau gîte.

Le 27 juin suivant, le seigneur de Saint-Macaire remet à FOULQUES DE LINIERS, le supérieur des arrivants, une charte, acte authentique qui garantit leur avenir. Le document mentionne les donateurs, leurs dons et les services demandés en retour.

L’abbé de Sainte Croix, dont le prieur de Saint-Macaire est le mandataire, donne aux religieux le bois et la vallée du Luc, en vertu de son droit de propriété sur cette partie du domaine de Saint-Macaire, reçue du Duc d’Aquitaine en 1027. Il les autorise à bâtir leur couvent près de la chapelle.

GUILLAUME-EMMANUEL (en Gascon GUILHEM-AMANIEU) de GABARRET, seigneur de Saint-Macaire, vicomte de Bezaume, leur cède la dîme du pain cuit dans le four du château de Saint-Macaire, mais aussi au château de la vicomté de Benauge, dont son épouse, Agnès de Taillefer est l’héritière.

En retour, il demande aux religieux de célébrer, chaque année, un office pour le repos de son âme et celle de son épouse.

Six témoins signent l’acte : le prieur de La Réole et celui de Saint-Macaire, deux soldats de garde, un prêtre et un moine.

– Où situer les vicomtés de Benauge et de Bezaume ?

benauge 1Nous n’avons, pour nous aider, que la géographie des diocèses de Bordeaux et de Bazas au XVIIIe siècle, dont les limites sont les mêmes depuis le Moyen Age.

L’archiprêtré de Benauge, diocèse de Bordeaux, avec 47 paroisses s’inscrit dans le triangle Langoiran, Targon, Pian sur Garonne (le château est à Arbis et l’archiprêtre à Loupiac).

L’archidiaconé de Bezaume, diocèse de Bazas, avec 63 paroisses, est contenu dans le quadrilatère : Saint Martin de Sescas, Flaujagues, Pujols sur Dordogne, Ste Bazeille.

Le château de Duras, attribué aux vicomtes de Bezaume, était dans le diocèse d’Agen, où la prolifique famille de Gabarret contrôlait de vastes territoires et le château de Bouville (aujourd’hui Beauville) près d’Agen.

– Qui sont les nouveaux religieux ?

richard coeurdelion 1Ils sont d’un ordre récent né autour de la cabane d’un ermite, ETIENNE, fils du comte de THIERS, venu se cacher dans le bois de Muret, à AMBAZAC (à 14 Km au nord ouest de Limoges), pour vivre dans la prière et l’austérité.

Son exemple lui avait attiré de nombreux disciples. Quand il mourut, en 1124, les moines, devenus indésirables en ce lieu, emportèrent la dépouille de leur saint fondateur et allèrent se blottir dans la solitude de GRANDMONT, à Saint Sylvestre, près de Laurières.

C’est là que devait prospérer l’ordre des « GRANDMONTAINS » grâce à la libéralité des rois d’Angleterre, originaires d’Anjou et d’Aquitaine. (L’Angleterre était alors une colonie française de la Normandie, de l’Anjou et de l’Aquitaine.)

Au Luc, les Grandmontains allaient être gratifiés en 1190, par le jeune roi RICHARD, âgé de 33 ans.
Il vient de convoquer à La Réole tous les notables du clergé et de la noblesse d’Aquitaine pour solliciter leur aide de participation à la Croisade contre les infidèles en Terre Sainte.
Du Limousin jusqu’au Béarn ils arrivent tous, y compris le « correcteur » (supérieur) du Luc, pour lui rendre hommage.

Le Roi se montre particulièrement attentif à la condition matérielle des Grandmontains. Aussi le 4 février 1190, il dicte en latin une charte en leur faveur, spécifiant les privilèges accordés et ses ordres pour assurer leur sécurité. Par souci de précision il y mentionne expressément, avec l’orthographe gasconne d’alors, le vocable local de VERDELAYE (prononcé Berdelaille) (1).
Il est familier de la langue d’Aquitaine : sa mère ALIENOR (Eléonore) est née à Belin, son arrière-grand-père, Guillaume IX duc d’Aquitaine a écrit des poèmes gascons.

Grâce à cette charte, apparaît officiellement, pour la première fois le nom de VERDELAYE.

Apprenant les grâces obtenues dans le sanctuaire, Richard vient à Verdelaye invoquer les secours de Notre Dame pour la Croisade. Il laisse 300 pièces d’argent aux moines pour dire une messe par semaine durant son expédition.
Notre Dame de Verdelais allait l’exaucer.
Son ardeur entraînante dans les batailles suscita l’enthousiasme de son armée, pour laquelle il devint RICHARD CŒUR DE LION.
Il subjugua ses ennemis. Le Sultan Saladin signa avec lui une trêve qui permit aux chrétiens la visite des Lieux saints.

(1) Habitué à la lecture Saint Germain en Laye (lè accent grave) un Parisien lira Blaye (blè) donc Verdelaye (Verdelè) . De plus le Gascon ignore la labiale aspirée V et lui substitue la labiale explosive B comme en espagnol.

V) Verte Laye ou Bourdelais
En marge des épisodes précédents, nous allons essayer de préciser un peu plus ce que nous savons de l’origine étymologique du nom de notre commune : VERDELAIS.

Nous avons vu que dès le début du Moyen Age le site de l’actuel VERDELAIS était désigné sous le vocable du LUC . Le mot LUC vient du latin LUCUS : le bois sacré, ou, plus précisément : le bosquet où est vénérée une idole et où une lueur de flamme éclaire la pénombre. En effet, lueur dérive de la racine LU comme LUX et LUMEN – LUMIERE, luna, astre éclairant la nuit. LUCINA, la divinité romaine qui assiste la mère quand elle « donne le jour » à son enfant. Ce qui permet d’imaginer que le lieu était dédié à un antique culte païen, bien avant sa métamorphose Chrétienne.

Le nom de LUC continuera à être employé jusqu’au XVIe siècle, pour désigner l’actuel Verdelais, dans les nombreux textes, rédigés en latin, où on le trouve utilisé sous des formes diverses. LO LUK dans une sentence du Roi Edouard 1er d’Angleterre du 27 mars 1289. Tandis que l’on rencontre la dénomination LUCO ou encore VIRIDIS LUCUS dans le texte de l’acte de fondation du 27 juin 1160 donnée par Guillaume Amanieu. VIRIDIS LUCUS est la désignation du lieu que l’on retrouvera beaucoup plus tardivement dans les six brefs d’indulgences du Pape URBAIN VIII accordés en 1640.

A partir du XVIIe siècle, c’est ce nom traduit sous sa forme française ( ou Gasconne) : VERDELES VERDELAYS, ou VERDELAYE qui est seul transcrit dans le texte latin comme c’était déjà le cas dans la charte du 4 février 1190 du Roi Richard Cœur de Lion en faveur des Grandmontains.

Retenons ce nom : VIRIDIS LUCUS

Nous avons vu que Lucus est la traduction latine de Luc, qui signifie : Forêt, associée à l’idée de sacré ou de divinité. Viridis est le mot latin qui désigne la couleur verte.

VIRIDIS LUCUS signifie donc VERTE FORET ou VERTE LAYE.

Le rédacteur de l’acte précité avait très probablement une âme de poète puisqu’il a cru utile de souligner la couleur de la forêt qui dominait alors au Luc, avec l’attrait que cela pouvait exercer sur les disciples de Saint-Etienne de Grandmont, les premiers religieux à s’installer là où ils allaient rester cinq siècles.

Si de VERTE LAYE on est passé à VERDELAIS c’est que le nom de notre village a subi l’un de ces échanges de lettres très fréquents dans l’évolution des langues. Le Gascon quant à lui prononcera Berdelaye. L’exemple le plus souvent cité pour illustrer l’analogie entre les termes Laye et Forêt, est : Saint Germain en Laye qui signifie Saint Germain en Forêt ou la Forêt.

Mais il faut également évoquer une autre hypothèse défendue par le père Claude Proust, de l’ordre des Célestins, à qui l’on doit l’édification de la façade de la Basilique, et, qui, en l’an 1700 écrivait dans son Guide des Pèlerins de N.D. de Verdelays : « …anciennement, la Chapelle s’appelait N.D des BOURDELAIS (forme gasconne de Bordelais) à cause de la dévotion qu’elle inspirait aux fidèles de la région, et, par corruption, on arriva à dire Berdelays ou Verdelays. »

Nous nous bornerons à constater que la plus ancienne orthographe du nom français reflète le mieux le sens étymologique même si l’on a pu observer par la suite de multiples variations comme il arrive souvent pour les noms de lieux.

Faut-il rappeler encore, que le Luc de jadis ne constituait qu’un quartier de ce qui était alors la paroisse d’AUBIAC, avant de devenir la Commune d’Aubiac et Verdelais, puis celle de Verdelais tout court…

VI) Les Grandmontains

A la mort de Géraud des Graves en l’an 1159, on se souvient que Guillaume Emmanuel de Gabarret (Guilhem Amanieu) Seigneur de Saint-Macaire, Vicomte de Benauge, fait venir au Luc (le site de l’actuel bourg de Verdelais) des religieux d’un ordre nouvellement créé dans le Limousin par Saint Etienne de Grandmont : les Grandmontains. Ils ont pour mission d’y perpétuer le culte marial inspiré par l’ancien Croisé devenu ermite. Après avoir pris possession des lieux, ils bâtissent un couvent et une chapelle près de l’ermitage du vénérable Géraud. Ils sont, en cela, secondés par les libéralités de Guilhem Amanieu.

grandmont 1Ces moines, au nombre de quatre ou cinq, vont mener là leur dure vie de prière, de travail et d’austérité. Il est probable que leur maison ne soit pas un édifice considérable. Elle est désignée dans une bulle du 27 août 1182 du pape Lucius III, qui leur accorde quelques faveurs, sous le nom de « celle » (cella) c’est à dire petite maison.

En 1185, Hèlie Gérard le « Correcteur » (de 1182 à 1210) qui a succédé à Foulquès de Liniers le fondateur, est témoin du premier miracle opéré à Verdelais que nous puissions connaître. C’est un jeune aveugle de naissance de quinze ans qui recouvre la vue.
Le fils de G. Amadieu, Bernard de Bouville renouvelle les donations faites par son père aux Grandmontains, en particulier celle de la dîme du pain cuit aux châteaux de Benauge et de Saint-Macaire.

En février 1190, nous l’avons déjà évoqué, le jeune roi Richard Cœur de Lion est à La Réole, où il confirme et amplifie les privilèges accordés aux moines de « Verdelaye ». Il déclare qu’il prend sous sa garde et celle de ses successeurs les religieux, leur maison, leurs terres, la chapelle de la Vierge ; il ordonne de veiller sur ces biens comme s’ils étaient les siens propres. Instruit des grâces obtenues dans l’humble chapelle, il viendra lui-même s’y agenouiller.

Très vite, l’ordre de Grandmont va souffrir de la rigueur de vie excessive, à laquelle ses religieux sont astreints. Notamment, sur le plan de la pauvreté collective, érigée en principe.

En 1223 le vicomte Pierre de Gabarret successeur de G. Amadieu vient à Verdelais avec son épouse Guillemette de Benauge, pour remercier la vierge de la naissance de son fils. Il se montre généreux vis à vis des Grandmontains.

Au mois d’août 1253 Henri III d’Angleterre, vient entendre la messe à la chapelle du Luc avant d’entreprendre le siège à Saint-Macaire. La ville forte tombe entre ses mains. Le 6 novembre de la même année le château de Benauge qui a longtemps résisté à ses coups, sera également pris d’assaut.

La Benauge pacifiée, le roi envoie au Luc cent pièces d’or en l’honneur de Marie, des vases d’or pour le service de la chapelle, avec d’autres présents…

En 1295, le chapitre général réuni à Grandmont fixe les taxes annuelles. Le Luc, avec ses 40 sols ou 2 livres figure parmi les plus pauvres.
En 1317, le pape Jean XXII réorganise l’ordre. Grandmont est érigée en abbaye. Le supérieur de la maison de Verdelais prendra la dénomination de Prieur. La guerre de Cent Ans n’est pas loin…

1357, le monastère est en ruine. Retiré à Grandmont le prieur de l’époque, Jean Ithier, se met à écrire toute l’histoire passée de son couvent. C’est là, qu’il révèle l’existence d’un vrai pèlerinage et une multitude de miracles.

La paix revenue, intervient l’épisode connu de tous, la découverte de la statue de Notre Dame par la Comtesse Isabelle de Foix, sous le « pas de sa mule » dans une cache où elle avait été placée par les Grandmontains pour la soustraire aux profanations. A la suite de quoi Isabelle, épouse d’Archambaud de Grailly, vicomte de Benauge fera rétablir la chapelle et le couvent, de nouveau confiés aux Grandmontains.

charles7 1A partir de 1453. Charles VII achevait la conquête de la Guyenne. Désormais, Verdelais ne cessera plus d’être rattachée à la France.

Par des actes notariés, nous apprenons qu’au XVe siècle, le monastère portait le nom de « Nostra Dona Deu Luc ou « Nostra Dona de Berdelaye », de Verdelays, ou de « Verdalays », formes qui deviennent de plus en plus prédominantes à mesure qu’on avance dans le XVIe siècle. Au milieu du XVIe siècle un seul religieux était attaché au sanctuaire et l’ordre de Grandmont n’avait cessé de décliner.

Puis ce sont les guerres de religions. Les bandes de Symphorien de Duras assiègent Saint-Macaire et se répandent dans les villages voisins. Les églises sont saccagées et profanées. La statue de Notre Dame, une nouvelle fois dissimulée, échappera à la destruction…

En 1604, pour payer les subventions exigées par le pouvoir royal, tout le temporel de Verdelais est mis en vente. Mais depuis déjà un demi-siècle, le monastère avait subi un pillage féroce et les Grandmontains avaient abandonné les lieux pour ne plus jamais y revenir.

Seuls subsistent aujourd’hui comme témoignage de leur contribution à l’œuvre de Verdelais, les gros murs qui séparent la nef centrale de la Basilique, des bas côtés. Ils sont là depuis le XIIe siècle.

VI) Les Grandmontains

A la mort de Géraud des Graves en l’an 1159, on se souvient que Guillaume Emmanuel de Gabarret (Guilhem Amanieu) Seigneur de Saint-Macaire, Vicomte de Benauge, fait venir au Luc (le site de l’actuel bourg de Verdelais) des religieux d’un ordre nouvellement créé dans le Limousin par Saint Etienne de Grandmont : les Grandmontains. Ils ont pour mission d’y perpétuer le culte marial inspiré par l’ancien Croisé devenu ermite. Après avoir pris possession des lieux, ils bâtissent un couvent et une chapelle près de l’ermitage du vénérable Géraud. Ils sont, en cela, secondés par les libéralités de Guilhem Amanieu.

grandmont 1Ces moines, au nombre de quatre ou cinq, vont mener là leur dure vie de prière, de travail et d’austérité. Il est probable que leur maison ne soit pas un édifice considérable. Elle est désignée dans une bulle du 27 août 1182 du pape Lucius III, qui leur accorde quelques faveurs, sous le nom de « celle » (cella) c’est à dire petite maison.

En 1185, Hèlie Gérard le « Correcteur » (de 1182 à 1210) qui a succédé à Foulquès de Liniers le fondateur, est témoin du premier miracle opéré à Verdelais que nous puissions connaître. C’est un jeune aveugle de naissance de quinze ans qui recouvre la vue.
Le fils de G. Amadieu, Bernard de Bouville renouvelle les donations faites par son père aux Grandmontains, en particulier celle de la dîme du pain cuit aux châteaux de Benauge et de Saint-Macaire.

En février 1190, nous l’avons déjà évoqué, le jeune roi Richard Cœur de Lion est à La Réole, où il confirme et amplifie les privilèges accordés aux moines de « Verdelaye ». Il déclare qu’il prend sous sa garde et celle de ses successeurs les religieux, leur maison, leurs terres, la chapelle de la Vierge ; il ordonne de veiller sur ces biens comme s’ils étaient les siens propres. Instruit des grâces obtenues dans l’humble chapelle, il viendra lui-même s’y agenouiller.

Très vite, l’ordre de Grandmont va souffrir de la rigueur de vie excessive, à laquelle ses religieux sont astreints. Notamment, sur le plan de la pauvreté collective, érigée en principe.

En 1223 le vicomte Pierre de Gabarret successeur de G. Amadieu vient à Verdelais avec son épouse Guillemette de Benauge, pour remercier la vierge de la naissance de son fils. Il se montre généreux vis à vis des Grandmontains.

Au mois d’août 1253 Henri III d’Angleterre, vient entendre la messe à la chapelle du Luc avant d’entreprendre le siège à Saint-Macaire. La ville forte tombe entre ses mains. Le 6 novembre de la même année le château de Benauge qui a longtemps résisté à ses coups, sera également pris d’assaut.

La Benauge pacifiée, le roi envoie au Luc cent pièces d’or en l’honneur de Marie, des vases d’or pour le service de la chapelle, avec d’autres présents…

En 1295, le chapitre général réuni à Grandmont fixe les taxes annuelles. Le Luc, avec ses 40 sols ou 2 livres figure parmi les plus pauvres.
En 1317, le pape Jean XXII réorganise l’ordre. Grandmont est érigée en abbaye. Le supérieur de la maison de Verdelais prendra la dénomination de Prieur. La guerre de Cent Ans n’est pas loin…

1357, le monastère est en ruine. Retiré à Grandmont le prieur de l’époque, Jean Ithier, se met à écrire toute l’histoire passée de son couvent. C’est là, qu’il révèle l’existence d’un vrai pèlerinage et une multitude de miracles.

La paix revenue, intervient l’épisode connu de tous, la découverte de la statue de Notre Dame par la Comtesse Isabelle de Foix, sous le « pas de sa mule » dans une cache où elle avait été placée par les Grandmontains pour la soustraire aux profanations. A la suite de quoi Isabelle, épouse d’Archambaud de Grailly, vicomte de Benauge fera rétablir la chapelle et le couvent, de nouveau confiés aux Grandmontains.

charles7 1A partir de 1453. Charles VII achevait la conquête de la Guyenne. Désormais, Verdelais ne cessera plus d’être rattachée à la France.

Par des actes notariés, nous apprenons qu’au XVe siècle, le monastère portait le nom de « Nostra Dona Deu Luc ou « Nostra Dona de Berdelaye », de Verdelays, ou de « Verdalays », formes qui deviennent de plus en plus prédominantes à mesure qu’on avance dans le XVIe siècle. Au milieu du XVIe siècle un seul religieux était attaché au sanctuaire et l’ordre de Grandmont n’avait cessé de décliner.

Puis ce sont les guerres de religions. Les bandes de Symphorien de Duras assiègent Saint-Macaire et se répandent dans les villages voisins. Les églises sont saccagées et profanées. La statue de Notre Dame, une nouvelle fois dissimulée, échappera à la destruction…

En 1604, pour payer les subventions exigées par le pouvoir royal, tout le temporel de Verdelais est mis en vente. Mais depuis déjà un demi-siècle, le monastère avait subi un pillage féroce et les Grandmontains avaient abandonné les lieux pour ne plus jamais y revenir.

Seuls subsistent aujourd’hui comme témoignage de leur contribution à l’œuvre de Verdelais, les gros murs qui séparent la nef centrale de la Basilique, des bas côtés. Ils sont là depuis le XIIe siècle.

VII) Les Célestins

Nous avons pu déjà apprécier ici, combien l’histoire passée de notre commune est étroitement liée à celle du pèlerinage Marial qui se perpétue chez nous depuis le début du XIIe siècle. Et, plus particulièrement, à celle des ordres religieux successifs qui en ont été les gardiens.
Grâce à eux et à leurs écrits, nous pouvons aujourd’hui connaître les différentes étapes de la constitution de notre village de Verdelais autour du sanctuaire, et constater comment, progressivement, la paroisse d’Aubiac s’est déplacée du bord de Garonne où elle connaissait une certaine prospérité liée à l’activité du port fluvial, pour s’installer autour de la chapelle et du monastère de Verdelais où affluent les pèlerins, et qui deviendra le centre paroissial avant de donner son nom à la commune.

Après le départ des Grandmontains, la chapelle et le cloître, isolés dans leur solitude boisée, tombent rapidement en ruines même si l’exercice du culte s’y perpétue occasionnellement.
Le Cardinal François de Sourdis, archevêque de Bordeaux, lors de sa visite à l’archiprêtre de Benauge, le 28 mars 1605, se rend à Verdelais. Il répond favorablement à la requête des habitants d’Aubiac en autorisant leur curé à célébrer les offices dans la chapelle abandonnée de Verdelais « toutes les fois que les eaux de la Garonne débordée isoleront leur église paroissiale dédiée à Saint-Maurice ».

Des travaux de restauration sont engagés. De nombreuses guérisons inexpliquées s’opèrent dont le Cardinal est averti.
Devant l’accroissement permanent des pèlerinages, le Cardinal de Sourdis confie aux moines Célestins les destinées de Verdelais (1625). Les Célestins se rattachent à la famille des Bénédictins. Leur ordre a été fondé vers le milieu du XIIIe siècle par Pierre Morone, devenu plus tard le Pape Saint-Pierre Célestin V. Sa statue, comme celle de Saint Benoît (respectivement à gauche et à droite du retable de la Basilique) ornent le chœur de l’église que ces moines entreprennent d’agrandir et d’embellir. C’est donc à eux que nous devons le remarquable retable baroque, riche en or, en marbre et en ornementations qui encadre l’antique statue de Notre Dame, la voûte ogivale à nervures multiples du chœur et du transept, ainsi que le nouveau cloître (aujourd’hui mairie et groupe scolaire).

Plus tard, sous le supériorat du Père Claude PROUST qui contribue largement à la prospérité de Verdelais, on aménage depuis Saint-Macaire, un chemin d’accès au monastère, agrémenté de petites chapelles (depuis longtemps disparues). L’église se trouve encore agrandie par un porche surmonté d’une tribune et ornée de la façade que nous connaissons aujourd’hui. Cet ensemble est dominé par un campanile à jour (détruit par les termites et définitivement déposé en 1937). On remarquera les armes du Duc d’Epernon Bernard de Lavalette sur la clé de voûte de la chapelle droite du transept (côté cierges) dont on sait qu’il contribue au financement des travaux pour 1500 livres (1648).
Les Célestins construisent encore la sacristie ornée de superbes boiseries, et la chapelle qui la surplombe derrière le maître autel.

La Fronde (1648-1653) n’épargne pas Verdelais. Les douze religieux doivent compter sur les aumônes et, souvent, avoir recours à l’emprunt.
Le 17 juillet 1656, les Célestins obtiennent de Mgr Henri de Béthune, qui a succédé au Cardinal de Sourdis, d’exercer un droit de patronage sur l’église Saint-Maurice qui dépendait jusque-là de l’abbaye bénédictine Sainte Croix de Bordeaux. Le 2 mars 1656 le roi Louis XIV confirme la décision de l’archevêque. C’est sous l’épiscopat d’Henri de Béthune (1646-1680) que les importants travaux cités précédemment s’achèvent.

Pendant la première moitié du XVIIIe siècle, les propriétés foncières des Célestins se sont agrandies. Ils possèdent une soixantaine d’hectares sur les paroisses d’Aubiac, Saint-Maixant, Sainte Croix du Mont et Semens. La plupart de ces terres sont affermées. Tout comme le moulin à vent de Cussol ou celui à eau du Luc, ou encore l’hôtellerie contiguë au Couvent donnée par la famille de Pontac en 1662 (ancienne maison Rassis), une boucherie et trois boutiques occupées par des marchands de chapelets. Tous ces biens, assortis d’autres avantages comme le droit de pêche en Garonne, ne procurent pas pour autant des revenus importants aux religieux. Malgré cela, leur générosité est exemplaire vis à vis des pauvres de la paroisse d’Aubiac.

Durant le XVIIIe siècle, Verdelais est devenu le sanctuaire Marial le plus populaire de toute la Guyenne ; les pèlerins se comptent par milliers. La plupart arrivent par la Garonne, à bord de petits bateaux à voile (Gabarres). Le port de la Garonnelle connaît une importante activité comme centre de transit pour les marchandises, comme en témoigne le registre des délibérations du conseil municipal (26 septembre 1790) de la municipalité d’Aubiac.

De cette époque datent les premiers ex-voto encore conservés de nos jours : tableaux, maquettes de navires ; (les objets de valeur ont été détruits lors de la révolution) et les nombreux volumes du Livre des Miracles (dépositions formulées en présence de témoins innombrables ou devant notaire).

Durant la seconde moitié du XVIIIe siècle, la lutte anti religieuse bat son plein qui conduira à la sécularisation des religieux restant à Verdelais. Puis à la dissolution de l’ordre. L’archevêché afferme les biens en 1779. C’est la période de la Révolution. Après inventaire (12 juillet 1790) les biens mobiliers et immobiliers de l’ancien couvent sont mis aux enchères à Cadillac (27 janvier 1792).

Tout est vendu, sauf l’église. Pendant toute cette période troublée le dernier Célestin de Verdelais, le Père Ricard, continuera, bien que sécularisé, à exercer son ministère du mieux qu’il pourra. Il s’éteindra le 4 janvier 1800 et sera inhumé dans le caveau de ses anciens confrères, dans l’église même, en présence d’une foule considérable.

Nous arrivons au Consulat. Le 18 avril 1802 le Concordat ramènera la paix religieuse. Ce n’est qu’en 1838 que les Maristes succéderont aux Célestins.

VIII) La Révolution

La savoureuse et célèbre anecdote qui suit est directement transcrite de l’ouvrage du père Philippe Gobillot : « Notre Dame de Verdelais » aux éditions LETOUZET – Paris 1926 pages 78 et 79 (1). L’événement figure aussi sur un vitrail de la Basilique (bas côté gauche, au fond de l’église).

« Nous sommes arrivés à la période la plus tragique de la Terreur (novembre 1793 – juillet 1794). Le culte constitutionnel lui-même est devenu suspect aux maîtres de la France. A leur gré, les municipalités, les représentants du peuple en mission peuvent ordonner la fermeture des églises ; les prêtres assermentés tremblent maintenant pour leur vie. A Verdelais, depuis la fin de 1792, le maire était Grenouilleau.

Au début de la Révolution, commandant du régiment de la garde nationale d’Aubiac, il avait veillé au bon ordre du pélerinage, le jour de la Pentecôte, qui continuait à attirer une foule de pèlerins. Sur l’ordre de la municipalité, c’est lui qui avait organisé les patrouilles chargées de surveiller la tenue dans l’église, jusqu’à la fermeture des portes, et de circuler, la nuit, dans les cloîtres et les dortoirs.

Mais son âme a suivi l’ascension des haines ; il est devenu un farouche jacobin. La pensée de la Vierge vénérée, toujours debout dans le retable, derrière l’autel, lui est un cauchemar. Un jour, il se rend à l’église, accompagné de la municipalité. Il avise le sacristain Jean Michel et lui ordonne d’abattre la statue ; menaces et promesses sont également inutiles :

« Je craindrais que Dieu m’écrase dans le moment même, répond Michel. D’ailleurs j’aime mieux obéir à Dieu qu’aux hommes ». Alors le maire envoie chercher un maçon, ancien soldat, d’une intrépidité bien connue, Étienne Gassies. Sommé à son tour d’abattre la statue, le modeste ouvrier manifeste son horreur. Furieux, Grenouilleau l’accable de cris de colère. « Je te l’ordonne au nom de la loi », hurle-t-il. « Et moi, répond Gassies je te dis : Fais-le toi-même, citoyen maire, et monte si tu l’oses ; pour moi, jamais ! »

Sur le champ, Grenouilleau applique une échelle, il monte, sa main va saisir la statue. Que se passe-t-il alors ? Son visage, affreusement pâle, trahit l’épouvante, ses yeux se ferment, ses genoux tremblent d’un mouvement convulsif : « Soutenez-moi, murmure-t-il ; je n’y vois plus. » Il tombe dans les bras des officiers municipaux et, toujours en proie à l’épouvante, il est transporté dans une salle de la mairie. Ce qui ne l’empêche point, du reste, de prescrire la fermeture de l’église : défense d’y entrer sans une permission *. »

M. Grenouilleau était le propriétaire de la maison qui est devenue l’actuel E.S.A.T. (ex C.A.T.)

(1) Fruit de recherches importantes, véritable travail d’historien, cet ouvrage de 191 pages dont 42 pages de notes serrées très riches d’informations, a été publié en 1926. Malgré trois rééditions successives, il était depuis longtemps devenu introuvable. Aussi, la municipalité avec le Concours du Conseil Général de la Gironde, a pris l’initiative d’en faire réaliser une série de 160 exemplaires en fac-similés numérotés.
Les Verdelaisiens qui voudraient se le procurer, peuvent le faire, directement au secrétariat de la Mairie, ou encore au musée, au prix unique de 25€.

(2) O’Reilly : « Histoire de Verdelais » p 131-133 et archives du presbytère de Verdelais : détails consignés par écrit d’après les souvenirs des survivants de l’époque. Ces faits ont été placés en 1793 ; mais nous pensons qu’il se rapportent plutôt à 1794. Dans la mémoire populaire, tout ce qui se rattache à la Terreur est spontanément attribué à 1793, alors qu’en fait la persécution religieuse a surtout sévi de novembre 1793 à juillet 1794.

Le 25 octobre 1793, l’église de Verdelais était encore réservée au culte (Registres des délibérations municipales d’Aubiac). Nous serions plutôt portés à croire que la tentative d’enlèvement de la statue eut lieu le 9 juillet 1794 (21 messidor an II), date à laquelle les officiers municipaux trouvent derrière l’autel des pièces d’argent qu’ils envoient au district de Cadillac (cf. Registres des délibérations municipales d’Aubiac, 13 pluviose an III – 20 janvier 1795).

IX) L'Œuvre des Péres Maristes

Après la période troublée de la Révolution, Monseigneur d’AVIAU, archevêque de Bordeaux prenait possession de son siège le 15 août 1802. Il va particulièrement s’intéresser à Verdelais. Mais, à l’époque, il fallait d’abord racheter les biens immobiliers et cela coûtait très cher.

En 1819, Monseigneur d’AVIAU envoie pour établir une enquête, le Père CHAMINADE, fondateur des Marianistes. Grand dévot de Notre Dame de VERDELAIS le Père Chaminade l’était depuis le jour où, élève au collège de Mussidan, il obtint la guérison rapide d’une blessure à la jambe (un ex-voto sur marbre, visible dans la nef centrale de la Basilique relate cette guérison). Il fit un rapport favorable à l’achat du couvent.

Le 21 août 1820, pour une somme de 14 000 Francs, difficilement réunie, Monseigneur d’AVIAU rachète une partie du couvent et l’enclos. Son projet était d’y établir une maison de retraite pour prêtres âgés, lesquels rempliraient l’office de chapelains. Le roi Louis XVIII approuvera les actes de l’archevêque par une ordonnance du 6 mars 1822.

Monseigneur de CHEVERUS succédera à Monseigneur d’AVIAU et placera à Verdelais des missionnaires diocésains, mais voici qu’arrive la révolution de juillet (1830), et la petite communauté de Verdelais se disperse.
A Monseigneur de CHEVERUS succèdera Monseigneur DONNET. Ce prélat d’un zèle entreprenant restera sur le siège de Bordeaux durant 46 ans (1836-1882).

Monseigneur DONNET se souvient qu’il a connu au grand séminaire de Lyon le vénérable Père Jean-Claude COLIN, fondateur de la Société de Marie, (Maristes), et ses compagnons. Au Père COLIN, il offre le sanctuaire de VERDELAIS. Après la maison de Belley et de Lyon, Verdelais sera en France la première fondation des religieux Maristes. Le 15 août 1838, le Père CHANUT installera la nouvelle communauté.

Pendant plus de 30 années on fera des travaux de réfection. On aménagera également des locaux pour les religieuses de la Présentation de Marie. Elles s’installeront à VERDELAIS le 1er juillet 1842, où elles ouvriront une école et donneront asile à des dames en retraite. C’est en 1862 qu’un orphelinat agricole est fondé sous le nom de Nazareth, par la Congrégation de la Doctrine Chrétienne de Bordeaux, et c’est en 1874 que les Frères Maristes établissent une école libre qui s’adjoindra un pensionnat.

L’église, à l’arrivée des Maristes, n’avait qu’une nef dont les murs étaient revêtus de boiseries. La voûte, basse, romane à berceau brisé est abattue et remplacée par celle que nous connaissons aujourd’hui, à nervures identiques à celles du chœur, précédemment aménagé par les Célestins en 1666, et du Transept. L’église est désormais éclairée grâce à des fenêtres. Des galeries sont aménagées, à l’étage, tout le long de la nef dans l’épaisseur des murs. Quant au porche on le diminue de sept mètres.

Pendant le long supériorat du Père CHAVAS (1846-1863) qui a succédé au Père LAGNIET, on procède à l’embellissement de l’avenue (les Allées) on construit un clocher, un calvaire est érigé, des vitraux sont installés dans les fenêtres du chœur. Le pavage en marbre de la nef est réalisé. 17 ans durant le Père CHAVAS présidera aux destinées du pèlerinage. Entre autre chose il fera aussi établir un ponton à la Garonnelle, et fera réparer les routes. Il rétablira également l’ancienne confrérie qui prendra le nom de Notre Dame Consolatrice des Affligés, laquelle confrérie inscrira 50 000 adhérents.

Entre 1852 et 1854 s’élèvera un clocher sur la droite de l’église à l’initiative du Cardinal DONNET. Il se couronne d’un dernier étage en bois avec colonnades, coupole et statue de la vierge en bois doré. L’Empereur Napoléon III contribue à sa construction pour une somme de 5 000 Francs. Le calvaire est aménagé sur les pentes du mont Cussol où il faudra remuer des milliers de mètres cubes de terre. Il sera inauguré le 2 juillet 1863 par Monseigneur DONNET.

Le Père CHOIZIN, Supérieur de 1863 à 1869 fera construire les bas côtés et, également, en pendant au clocher, la chapelle dédiée à Notre Dame des sept douleurs.

La consécration solennelle de l’église aura lieu le Ier juillet 1869 par l’évêque de VANNES Monseigneur GAZAILHAN. Malheureusement le 2 juillet 1870 un feu d’artifice ayant été tiré du sommet, le clocher prend feu et s’effondre dans sa partie supérieure, ainsi que la cloche qui entraîne des voûtes dans sa chute. Le 15 juillet 1870, c’est la guerre et il faudra en attendre la fin pour reconstruire. Le Cardinal DONNET organise une grande loterie pour trouver l’argent nécessaire à la reconstruction, mettant comme gros lot sa voiture de gala. Il présidera l’inauguration du clocher reconstruit, le 3 octobre 1875, œuvre de l’architecte bordelais DUPHOT.

Le 2 juillet 1856 a lieu la cérémonie du couronnement de la Vierge octroyé par le Pape PIE IX qui offre lui-même les couronnes d’or qui seront posées sur la tête de l’Enfant Jésus et de Marie. La cérémonie se fera en plein air. L’assistance est considérable ; on l’estime à 30 000 personnes. Avec le Cardinal, 8 évêques et 500 prêtres sont présents.

Lors des lois 1901 – 1906, les biens achetés en 1820 sont confisqués. M. GIRAUDIN, supérieur du Grand Séminaire rachète le logement des Pères, le Parc et le Calvaire. A la Municipalité reviendront l’église, et les bâtiments actuels : groupe scolaire, mairie, poste… Une nouvelle salle des « œuvres  » s’élèvera, encore à l’initiative des Pères Maristes, mitoyenne à la Mairie en 1911, pour abriter le patronage des « Chevaliers de Notre Dame » dont tout le monde se souvient encore pour ses activités nombreuses, sportives et culturelles. Ce local deviendra par la suite, salle de cinéma.

En 1924 l’église de Verdelais est érigée en Basilique mineure par le Pape Pie XI.

L’histoire de Verdelais continue depuis ses origines lointaines. Après les Grandmontains de 1160 à 1550, les Célestins de 1627-à 1779. Les Maristes de 1838 à 1990, puis aujourd’hui les Pères Passionnistes. Le sanctuaire continue a être servi avec ferveur.

Gageons que le pèlerinage connaisse encore dans l’avenir un nouvel essor. La tâche ne sera pas aisée. Mais le Père CHANUT venant prendre son poste à Verdelais ne s’était-il pas entendu dire par le Père DRUILHET, ancien éminent provincial des Jésuites : « Si vous avez la puissance de ressusciter les morts, vous pouvez tenter la résurrection de VERDELAIS ». C’était dans les années 1830…

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